Sois ton visage !

Sois ton visage!

Ce koan du XXIe siècle, comme le disait Fabrice Midal lors d’une soirée portes ouvertes de l’Association Serenissance il y a un an à Paris, m’a tant frappée que je l’ai gardé inscrit sur un post-it sur mon bureau depuis lors. Je le contemple tant ce qu’il a à me dire est abyssal.

La marque du temps

Si mon esprit n’a pas d’âge, ce n’est le cas de mon visage.Il est la marque du temps mais surtout, comme le disait Fabrice, il montre comment le temps œuvre en moi.

A la fois un et multiple, il dit qui nous sommes. Que ne pouvons-nous pas lire sur un visage ? Une expression, une tension, une lumière, l’intensité du regard, les rides d’expression, de fatigue ou de colère, tout s’y voit. Il est la matière brute de notre être qui se façonne au long des jours.

Ainsi, si nous pouvons cacher le reste de notre corps, le visage fait face aux autres, à l’existence. Il montre notre vulnérabilité.

Cela résiste tant que parfois il faut des injections, du laser, ou que sais-je encore, pour calfeutrer un peu aux autres, et à soi-même, cette vulnérabilité. Parce que ce n’est pas facile, parce que cette vulnérabilité demande à être apprivoisée, à être approchée, avec douceur.

Là où l’intensité de la vie se fait sentir

La méditation est pour cela une précieuse pratique car elle ouvre un espace où nous pouvons aller à la rencontre de ce qui nous atteint. Et il y a comme un lent retournement qui se fait. Nous commençons à voir que c’est précisément là où nous sommes entièrement démuni que l’intensité de la vie se fait sentir.

Se relier alors à notre vulnérabilité devient, comme par magie, une source de joie tranquille.

Il n’y a au fond rien à faire, sinon regarder dans une grande loyauté ce visage qui nous rappelle inlassablement au point essentiel.

Illustration : Dissolution par Samuel Yal, exposition Melancholia à la Villa Empain à Sens (jusqu’au 19 août 2018)