Le passage des oiseaux migrateurs

Oie sauvage oie sauvage
à ton premier voyage
quel âge avais-tu ?
Un matin tôt, roulant dans la campagne pour me rendre en ville, je regarde les voiles de brume recouvrant d’un duvet gris les champs labourés, le ciel mauve, et les nuages qui prennent la teinte orangée du soleil qui se lève; le triangle d’un vol d’oiseaux migrateurs apparaît alors dans le ciel, et je sens mon cœur qui se serre. Une petite voix s’insinue, tranchant net mon émotion : fin de l’été, oiseaux migrateurs, nostalgie, quel cliché !
Mettant en pratique ce que la méditation m’a appris, j’ai regardé mon commentaire droit dans les yeux et je lui ai dit : fous-moi la paix ! Je suis revenue à l’émotion qui m’avait saisie. Elle avait un peu changé, et soudain elle m’a rappelée que ce jour-là, précisément, il y a une année, nous fêtions l’anniversaire de mon compagnon disparu. Derrière ce que j’ai qualifié de cliché, il y avait une émotion qui, elle, n’était pas un cliché. Par habitude, j’ai préféré un jugement tuant dans l’œuf ce qui tentait de se montrer et qui était un peu trop poignant. On voit à quel point nous pouvons sans nous en rendre compte restreindre la réalité de notre vie, et combien la méditation est une aide précieuse pour lui rendre son intégrité et sa profondeur.

Notre tristesse n’est pas un cliché

Le vol des oiseaux migrateurs à la fin de l’été soulève dans le cœur des hommes un sentiment de tristesse, ou de nostalgie; ce n’est pas un cliché. Tous nous avons perdu une fois dans notre vie un être cher. Les oiseaux migrateurs nous rappellent ceux qui nous ont quittés, mais aussi que cette terre, nous devrons la quitter un jour. Et chacun, nous vivons et nous exprimons cette expérience d’une manière qui nous est propre.