Le grand secret

«Les peluches aussi connaissent le secret de l’être» m’écrivait il y a peu Catherine Ternaux, dont le blog Variations de la pesanteur émane un monde aussi discret qu’enjoué.

Pour preuve, elle joignait à son mot simple et profond cette photo, où l’on voit un âne, de paille et de son, enseigner à son amie Soja la fameuse formule pour se laisser pousser les oreilles.

Qui ne sait plus s’arrêter devant une peluche – interpellé par sa présence parallèle – a peut-être depuis trop longtemps replié ses ailes. C’est bien dommage ! Et d’autant plus que d’éminents enseignements de la voie du Bouddha nous engagent diligemment, entre deux méditations, à devenir enfants de l’illusion.
Au fait, face à une peluche, où se niche-t-elle – l’illusion?
Est-ce céder – le temps du rêve – à l’artifice du jouet?
Ou bien (au prétexte d’être fait de chair et non de coton) de se croire exempt de fabrication? En faut-il cependant des cisaillages et des ravaudages pour fabriquer une grande personne!
Et l’enfant né de cette illusion – où le chercher?
Dans l’étonnement que la peluche ne fasse point suivre d’un quelconque mot ce que le surgissement de sa présence promettait de conversation?
Dans l’heureuse surprise des anciennes choses dégradées en objets – reprenant soudain corps?
Et dites – pourquoi se fige-t-on ainsi dans la cire de l’instant pour se mettre au diapason de leur éternelle contemplation?
Vertiges de l’enfance devant le coffre ouvert des questions! Et tendresse de ces vertiges que la sage immobilité des poupées nous inspire. Désarmantes peluches – pétrifiantes de bonté – accordez-nous la simplicité!
Aux enfants oubliés que nous sommes – veuillez vous offrir sous la forme de quelque effigie de laine à la proue de nos vies ! Vous nous apprendrez ainsi à nous tenir, devant la joie et devant la peur, comme des jouets qui savent tout accueillir.