Tribulations d’un coussin

Lorsque j’ai découvert la méditation il y a 15 ans, nous pratiquions sur des coussins ronds et assez plats. Ils induisaient une assise très ancrée, avec les genoux posés sur terre. Ce qui m’a marqué tout de suite, c’était le sol qu’il m’offrait. Enfin un lieu pour ne rien faire, respirer, poser là tout mon être. Je me suis rapidement procuré un joli coussin tout blanc tout rond. Il était petit et cela m’arrangeait. Je pouvais le glisser sous le lit, ni vu ni connu.

Quelques étés plus tard, j’ai découvert dans le Limousin le coussin carré de l’Association Serenissance. Avec lui, une posture différente et des questions: que faire de ces genoux laissés libres? Que faire de ce léger déséquilibre qui me rappelle celui de mon existence ? Cela me désarçonnait et je fus rassurée de retrouver mon petit coussin blanc à mon retour à Sens.

L’été suivant pourtant un coussin carré rouge et jaune est revenu avec moi du séminaire, décidée à apprivoiser le déséquilibre. Plus question cette fois de le pousser en dessous de mon lit, il m’a fallu lui faire une place dans mon tout petit appartement. Je l’ai posé dans un coin, ce n’était pas l’idéal mais au moins il était là, visible.

L’année dernière, changement de lieu, changement de place, le voilà presque au milieu d’une pièce de l’appartement. Et, il y a quelques jours, alors j’entends pour la énième fois l’instruction de base pour apprendre à méditer chez soi : « il est bon d’aménager un lieu pour la pratique », voilà que la magie des enseignements se produit (nous avons beau les entendre et les réentendre, il y a toujours quelque chose de neuf à apprendre). Était-ce véritablement un lieu dédié à la pratique ? Pas si sûr… avec l’aide d’amis chers, j’ai regardé à neuf et décidé de transformer quelques petites choses.

Un paravent, deux estampes chinoises suspendues sur un mur blanc, et mon beau coussin – noir maintenant – posé en leur faisant face. Cette fois, ça y est !

Puis enfin, s’assoir dans cet espace.

Et voilà que l’expérience de la méditation y est entièrement transformée. A peine posée, je suis entièrement convoquée par l’esprit de la pratique. Ce qui aurait pu passer pour un souci décoratif est un fait un souci d’harmonie.

Si je me suis permise de partager les tribulations de mon coussin depuis le dessous de mon lit jusqu’au cœur de mon foyer, c’est qu’elles symbolisent bien le cheminement de la pratique dans mon existence.

Et le vôtre, quelle place lui avez vous donnée ?